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Le marché camerounais de la téléphonie mobile semble proche de sa limite de croissance, après une période de forte progression.
Après la grande explosion du début des années 2000, le marché camerounais des télécommunications a-t-il saturé sa marge d’expansion ? On le craint désormais, y compris chez les principaux opérateurs présents sur le marché. Et pour cause, le marché, qui comptait 5000 utilisateurs de téléphonie mobile en janvier 2000, a franchi aujourd’hui la barre des 4 millions d’abonnés. Une progression qui a surpris tout le monde, y compris les autorités qui ont dû faire passer, l’année dernière, le plan de numérotation téléphonique de 6 à 7 chiffres, puis de 7 à 8 chiffres. « C’est parce qu’on constate une augmentation du nombre d’abonnés, ce qui est d’ailleurs une preuve de la vitalité du secteur », expliquait Jean Louis Beh Mengue, le directeur général de l’agence de régulation des télécommunications. Avec 4 millions d’abonnés au téléphone mobile dans un pays qui compte 16 millions d’habitants, il parait difficile de pousser plus loin et de renouer avec les taux de croissance record connus par le secteur ces dernières années : « Si on regarde le taux de pénétration de la téléphonie mobile, qui se situe autour des 20-22%, on constate qu’il y a de la marge pour progresser. Mais si on fait une corrélation entre le taux de pénétration et le pouvoir d’achat des populations, on se rend compte que le marché est entré dans sa phase de maturité. Il sera de plus en plus difficile de trouver des taux de progression à deux chiffres », explique le directeur du marketing d’un des principaux opérateurs.
Le marché, qui comptait 5000 utilisateurs de téléphonie mobile en janvier 2000, a franchi aujourd’hui la barre des 4 millions d’abonnés.
Relancer le fixe Dans cette évolution, le traditionnel réseau filaire fixe semble avoir payé un prix fort à l’arrivée de la technologie mobile. Entre 2006 et 2007, le nombre d’abonnés au téléphone fixe a régressé, passant de 113 000 à environ 96 000. Néanmoins, l’opérateur étatique de la téléphonie fixe (Camtel, en cours de privatisation) a lancé depuis deux ans un nouveau réseau de la technologie Cdma (Code division multiple access), en partenariat avec la firme chinoise Huawei Technologies. Ce téléphone, mi-fixe mi-mobile, compte déjà plus de 60 000 abonnés qui compensent les pertes enregistrées sur les abonnés du fixe. Le gros du marché est donc partagé par MTN-Cameroon, filiale de la firme sud-africaine éponyme (56 % de parts de marché, soit environ 2,6 millions d’abonnés), et Orange-Cameroun (filiale de France Télécom). En dépit de ces craintes, le chiffre d’affaires du secteur reste rassurant : environ 350 milliards en 2007. Et les marges restent confortables, si l’on observe la générosité des opérateurs de téléphonie mobile dans les activités charitables. Malgré ces chiffres d’affaires mirobolants, il n’est pas toujours facile d’être opérateur du mobile dans un pays où il manque des infrastructures, comme le démontre le directeur du marketing déjà cité : « Les infrastructures de réseau possèdent à peu près les mêmes difficultés au Cameroun. Et l’industrie des télécommunications ne saurait faire la différence. Un exemple simple : en ce moment le Cameroun rencontre des difficultés dans l’approvisionnement en énergie. S’il y a une interruption dans la fourniture d’énergie, un client ne comprendrait pas que son téléphone soit affecté. Par conséquent, pour maintenir le service nous sommes obligés d’avoir recours à des générateurs. Nous en comptons plus de 300 qui fonctionnent au gasoil. Parfois les dits générateurs se trouvent dans des zones d’accès difficiles où les routes sont inexistantes, et quant elles existent, sont fortement abîmées. Donc on doit y stocker parfois jusqu'à 3000 litres de gasoil pour éviter toute panne. Ces sites reculés sont la cible favorite de voleurs, car isolés. On ne parle pas des questions relatives aux douanes sur nos équipement, où les impôts, ou encore le fait que l’environnement réglementaire a parfois du mal à suivre l’évolution de la technologie ». Tous ces surcoûts affectent les tarifs des télécommunications qui restent élevés, tant pour les entreprises que pour les particuliers. Une minute de téléphone coûte parfois plus cher qu’une baguette de pain. Cette faiblesse des infrastructures de base dans le secteur des télécommunications a été relativement compensée par la mise en service des fibres optiques. Reliées au câble international sous-marin Sat3, qui a un point d’atterrissement à Douala, ces fibres optiques enfouies le long du pipeline Tchad-Cameroun ont 14 points de sortie disséminés dans tout le territoire, ce qui facilite la pénétration des Tic dans l’arrière pays. D’autre part, les opérateurs ont lancé une initiative dans le sens du partage des infrastructures de transmission. Ce qui devrait, on l’espère, tirer les tarifs vers le bas.
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