Le Cameroun aurait-il du mal à entrer de plein-pied dans l'ère de la société de l'information ? Au vu des dysfonctionnements récurrents dans le secteur de la téléphonie mobile, cette impression désagréable est loin d'être exagérée. Difficile d'apprécier autrement le paradoxe qui prévaut en la matière dans notre pays. Avec l'expansion rapide de la téléphonie mobile, accompagnée d'un engouement croissant des consommateurs pour les technologies de l'information et de la communication, tout portait jusqu'ici à croire que le fossé numérique tant décrié se réduit chez nous à la vitesse grand V. Tel ne semble manifestement pas le cas. La réalité quotidienne offre un tableau nuancé, tant la fracture numérique est importante dans le secteur de la téléphonie.
Un malaise de plus en plus profond affecte le marché camerounais de la téléphonie mobile. Les désagréments ressentis par les usagers ne se comptent plus. Les plaintes les plus courantes concernent les réseaux inaccessibles ou perturbés par des interférences, les comptes clients inopérants, les services bloqués. Recharger ou transférer un crédit de communication, joindre aisément son correspondant, sinon lui envoyer un sms ou laisser un message dans sa boîte vocale ; autant de services pourtant basiques, mais qui sont de plus en plus assurés au petit bonheur la chance. On ne saurait envisager que les opérateurs du secteur puissent avoir un quelconque intérêt à s'aliéner en fin de compte de nombreux clients qui, tout bien considéré, paient le prix fort pour être en droit d'exiger une fiabilité minimale et une pérennité des prestations.
Le fait que les prestations des opérateurs de la téléphonie mobile laissent tant à désirer, ne peut qu'avoir une incidence négative sur l'ensemble de l'activité économique. Outre les désagréments ressentis au niveau de l'usager lambda, l'on imagine aisément le lourd préjudice enregistré dans le monde des affaires. Les très nombreux débrouillards dont le «call-box» constitue le gagne-pain, ont tout lieu de se plaindre des pertes de revenus imputables aux perturbations fréquentes de la téléphonie mobile.
Un autre paradoxe caractérise le secteur de la téléphonie mobile au Cameroun. Ce sont les tarifs que de nombreux consommateurs jugent exorbitants, en comparaison de ceux pratiqués dans d'autres pays d'Afrique subsaharienne. Au lendemain de l'entrée en service de la fibre optique ouvrant la voie aux télécommunications à très haut débit à très faible coût, les usagers des TIC ne voient pas venir la forte réduction pourtant inéluctable des tarifs.
Les offres de nouveaux services diversifiés, proposés à grand renfort de publicité par les opérateurs, cachent mal une certaine volonté de retarder le plus longtemps possible la baisse des tarifs induite par le nouvel environnement technologique. Les regards restent en tout état de cause tournés vers le ministère en charge des télécommunications et l'Agence en charge de la régulation du secteur, d'où devrait venir l'exigence d'une meilleure prise en compte des intérêts des consommateurs.